26 Septembre 2018

Allianz Global Wealth Report 2018 : en France, la croissance de l’endettement est supérieure à celle des actifs financiers pour la première fois depuis six ans

Allianz Global Wealth Report 2018 : en France, la croissance de l’endettement est supérieure à celle des actifs financiers pour la première fois depuis six ans

En 2017, les actifs financiers des ménages ont encore augmenté de 7,7 %, portant le total à 168 000 milliards d'euros

  •         Les placements financiers font leur grand retour – l’accélération de l’inflation ayant rendu les dépôts bancaires moins attractifs
  •         L’endettement des ménages continue de croître – de même que les inquiétudes autour de la capacité à rembourser la dette
  •        Si la mondialisation réduit les inégalités de richesses entre les pays, elle les creuse au sein des pays avancés selon notre indicateur propriétaire d’équité de richesse
  •        En France, la croissance de l’endettement est supérieure à celle des actifs financiers pour la première fois depuis six ans

Allianz dévoile la neuvième édition de l’Allianz Global Wealth Report, rapport mondial sur le patrimoine financier des ménages, qui analyse les actifs et passifs financiers des ménages dans plus de 50 pays.

Malgré la montée des tensions politiques, 2017 a été une très bonne année pour les investisseurs. La reprise économique qui a suivi la crise financière a culminé en une relance mondiale synchronisée. Les marchés financiers ont affiché d'excellentes performances, notamment les marchés d’actions. En conséquence, la valeur des actifs financiers[1] des ménages a fortement progressé de 7,7 %, atteignant 168 000 milliards d'euros. « L’année dernière a été une très bonne année pour les épargnants »a déclaré Ludovic Subran, Directeur de la Recherche Economique du groupe Allianz. « Mais voilà, l’ère de l’après-crise est définitivement révolue. Finie la période où une politique monétaire expansionniste garantissait une tendance haussière continue sur les marchés financiers. Les signes sont inquiétants : hausse des taux d'intérêt, querelles commerciales et montée des populismes provoquent tensions et turbulences financières».

Retour en force des placements financiers

En 2017, les comportements d’investissement ont sensiblement évolué. Après avoir largement boudé les actions et fonds d’investissement dans les années qui ont suivi la crise, les épargnants s’y sont intéressés de nouveau en 2017, année qui a été marquée par d’importantes entrées de capitaux dans cette classe d’actifs. Près d’un cinquième des fonds nouveaux – bien plus que durant les années d’avant crise – y ont été placés. Dans un contexte de forte expansion des marchés boursiers, les placements financiers ont ainsi connu la plus forte croissance de l’ensemble des classes d’actifs en 2017 – et de loin. Ils progressent de 12,2 % au total et représentent plus de 42 % de l’épargne fin 2017. Viennent ensuite les créances des compagnies d’assurance et des institutions de retraites, qui représentent 29 % du portefeuille d’actifs et ont progressé de 5,2 % l’an dernier.

Si les placements financiers reviennent au goût du jour, les dépôts bancaires tombent en disgrâce auprès des ménages partout dans le monde. Seuls 42 % des nouveaux investissements sont allés aux banques en 2017, contre 63 % l’année précédente, soit une baisse de plus de 390 milliards d’euros. En conséquence, la croissance des dépôts bancaires a reculé de deux points de pourcentage à 4,3 % (part du portefeuille d’actifs près de 27 %). « Les épargnants ont perçu la tendance du moment. Le désintérêt pour les dépôts bancaires, en particulier dans les premiers pays industrialisés, arrive à point nommé » selon Kathrin Brandmeir, co-auteure du rapport. « En effet, l'inflation est repartie à la hausse. Elle a triplé en 2017, bien qu'elle reste relativement modérée. En conséquence, les pertes de pouvoir d’achat des dépôts bancaires ont elles aussi explosé et totaliseraient 400 milliards d’euros pour la seule année 2017 ».

Les pays industrialisés comblent leur retard – les patrimoines financiers américains augmentent plus que les patrimoines chinois

Les années qui ont suivi la crise ont principalement été marquées par une croissance relativement faible des actifs dans les pays industrialisés par rapport aux pays émergents. La donne a également changé en 2017. L’accélération de la croissance du patrimoine financier a concerné exclusivement les pays avancés avec une hausse d’un point à 6,5 %, tandis qu'elle s’est contractée de trois points dans les pays émergents à 12,9 %. L’écart de croissance des actifs entre ces deux groupes de pays est ainsi à son plus bas depuis 2005, à 6,5 points de pourcentage. En moyenne l’écart était deux fois plus élevé dans les années 2000, à 13 points de pourcentage.

Cette évolution contrastée de la croissance des actifs financiers s’explique en grande partie par les différentiels de croissance entre poids lourds de ces deux catégories de pays : la Chine (où la croissance s'est essoufflée, passant de 18,3 % à 14 %) et les États-Unis (où la croissance a accéléré de 5,8 % à 8,5 %). En zone euro, la croissance a légèrement ralenti de 20 points de base, à 3,7 %. Les États-Unis ont donc de nouveau dépassé la Chine en croissance en valeur. En 2017, les États-Unis représentaient environ 44 % de la croissance mondiale des actifs financiers bruts des ménages, tandis que la Chine ne représentait que 25%. Ce ratio s’est établi en moyenne à 26 % contre 35 % au cours des trois dernières années – la Chine occupant alors la tête du classement.

Top 20 2017 par…

 

actifs financiers nets 
par habitant

 

 

...actifs financiers brut

par habitant

 

 

en euros

depuis le 
début de l'année en %

rang 
2000

 

 

en euros

depuis le 
début de l'année en %

rang 
2000

#1 Suisse

173 990

6,7

1

 

 #1 Suisse

261 100

5,0

1

 #2 États-Unis

168 640

8,9

2

 

 #2 États-Unis

208 500

7,7

2

 #3 Suède

98 380

5,1

12

 

 #3 Danemark

154 560

5,4

6

 #4 Pays-Bas

95 880

-1,1

6

 

 #4 Pays-Bas

143 950

-0,5

4

 #5 Belgique

93 580

0,2

3

 

 #5 Suède

141 280

5,3

12

 #6 Japon

92 000

4,7

4

 

 #6 Australie

134 460

5,1

15

 #7 Singapour

90 650

8,9

15

 

 #7 Canada

127 470

5,5

8

 #8 Taïwan

90 260

6,3

14

 

 #8 Singapour

125 960

7,2

10

 #9 Danemark

88 270

8,4

13

 

 #9 Belgique

117 940

0,9

5

 #10 Canada

87 390

6,3

8

 

 #10 Royaume-Uni

114 890

2,4

7

 #11 Nouvelle-Zélande

83 570

2,0

9

 

 #11 Japon

112 470

4,2

3

 #12 Royaume-Uni

82 360

2,1

5

 

 #12 Nouvelle-Zélande

109 700

2,8

11

 #13 Australie

72 080

5,4

18

 

 #13 Taïwan

108 820

6,0

17

 #14 Israël

68 710

3,9

10

 

 #14 Norvège

91 050

5,1

20

 #15 France

59 100

4,1

11

 

 #15 Israël

87 150

3,8

18

 #16 Italie

58 610

4,9

7

 

 #16 France

82 930

4,2

13

 #17 Autriche

53 980

3,5

17

 

 #17 Irlande

79 250

2,2

14

 #18 Allemagne

52 390

5,5

19

 

 #18 Autriche

75 460

3,0

19

 #19 Irlande

47 440

5,9

16

 

 #19 Italie

74 240

4,5

9

 #20 Finlande

30 230

4,8

20

 

 #20 Allemagne

73 630

4,8

16

         

 

L’endettement accélère encore

Les dettes des ménages ont progressé de 6 % en 2017, soit légèrement plus qu’en 2016 (5,5 %). Dans la zone euro, la croissance de l'endettement a également accélérée, mais toujours plus modérément (2,6 % contre 1,5 % en 2016). Cependant, grâce à la forte croissance économique, le ratio d’endettement mondial (ensemble des passifs en pourcentage du PIB) n’a que faiblement augmenté pour atteindre 64,3 % (zone euro : 62,9 %). Ces moyennes mondiales masquent naturellement des divergences manifestes. Dans certains pays, les niveaux et la dynamique de l’endettement ont atteint des seuils critiques ces dernières années. Néanmoins, une comparaison avec la situation des Etats-Unis peu avant la crise des subprimes montre que ces pays demeurent (tout juste) en dehors de la « zone de danger ». « Dans la majorité des pays étudiés, la dynamique de la dette privée n’est pas préoccupante », a commenté Michaela Grimm, co-auteure du rapport. « Cependant, en Asie, certains pays comme la Thaïlande, la Malaisie, la Corée du Sud et la Chine notamment, doivent en surveiller l'évolution de très près. Les similitudes avec les excès de crédit qui ont été observés avant la crise financière ne sont pas négligeables ». Malgré la forte croissance de la dette les actifs financiers nets, c’est-à-dire la différence entre les actifs financiers bruts et la dette, se hissent à un nouveau record mondial à 128 500 milliards d’euros fin 2017. Soit une augmentation de 8,3 % par rapport à l’année précédente.

Une participation accrue grâce à la mondialisation

Les deux dernières décennies de mondialisation rapide ont fait émerger une nouvelle classe moyenne (en termes d’avoirs financiers) qui comptait près d’1,1 milliard de personnes fin 2017. Moins d’un demi-milliard de personnes appartenaient à ce groupe au tournant du millénaire, dont un peu moins de la moitié étaient situées en Europe occidentale, en Amérique du Nord ou au Japon. Aujourd’hui, ces pays ne représentent plus qu’un quart de cette même classe moyenne mondiale. En revanche, la part de la Chine est passée d’un peu moins de 30 % à plus de 50 % sur cette période. Environ 500 millions de Chinois ont rejoint les rangs de cette classe moyenne par l'enrichissement financier depuis 2000, et plus de 100 millions de Chinois peuvent désormais se considérer comme faisant partie de la classe supérieure mondiale en termes d'avoirs financiers.

Accroissement des inégalités dans les pays avancés : Un nouvel indicateur de la répartition nationale de la richesse

Les inégalités nationales suivent une progression hétérogène. Si la répartition des richesses s’est uniformisée dans de nombreux pays depuis le début du millénaire, elle s’est en revanche détériorée dans de nombreux pays avancés : les États-Unis, les pays en crise dans la zone euro et même l’Allemagne et le Japon. La France fait elle aussi partie de ce groupe. L'impression que dans les « vieilles » nations industrialisées le fossé ne cesse de se creuser depuis quelques décennies entre riches et pauvres semble donc correspondre à la réalité dans de nombreux cas. Cependant, dans certains de ces pays – comme l’Allemagne et l’Italie – la tendance s’est inversée depuis la crise financière.

Pour brosser un tableau plus nuancé de la répartition de la richesse nationale, nous avons introduit dans ce rapport un nouvel indicateur d’équité de la richesse ou l’Allianz Wealth Equity Indicator (AWEI). Certains résultats sont surprenants. Outre les pays habituellement pointés du doigt comme les États-Unis, l’Afrique du Sud, l’Indonésie et le Royaume-Uni, le Danemark, la Suède et l’Allemagne font également partie du groupe de pays où les richesses sont inégalement réparties. En Scandinavie, ce résultat peut s'expliquer essentiellement par le niveau élevé d'endettement de d’une frange nombreuse de la population ; en Allemagne, le retard de la réunification et la carence générale dans les régimes de retraites financés par capitalisation sont des facteurs déterminants. En revanche, dans nombre de pays d’Europe orientale et occidentale, dont l’Italie, l’Espagne et la Grèce, la répartition de la richesse est relativement équilibrée. Même si les dernières années de crise et d’austérité ont pu creuser les inégalités, ces pays ont historiquement la capacité de les résorber, car les actifs ont traditionnellement été très largement distribués – notamment en ce qui concerne les actifs immobiliers. La France se situe en milieu de classement ; malgré la récente dégradation de la situation, les inégalités de richesse restent relativement modérées. « Notre nouvel indicateur d’équité de la richesse montre que nous devrions éviter de tirer des conclusions hâtives », a déclaré Ludovic Subran. « Hormis les États-Unis, la plupart des pays contredisent le cliché d'une inégalité de richesse forte qui se creuserait encore. La situation est plus nuancée ».

France : pour la première fois en six ans, la dette augmente plus vite que les actifs financiers

Les actifs financiers des ménages français ont progressé de 4,6 %, une croissance inférieure d’un point à celle des deux années précédentes. Dans le même temps, la dette a augmenté de 4,9 %. Il s'agit là non seulement de la hausse la plus marquée depuis la crise de l'euro en 2010, mais c'est aussi la première fois en six ans que la dette croît plus vite que les actifs. Cependant, les inquiétudes concernant un boom du crédit semblent exagérées. Le taux d’endettement des ménages a modérément augmenté pour atteindre 67,6 %, soit exactement le même ratio qu’en 2010 – et très loin de certains pays scandinaves ou en Suisse où ces ratios dépassent 100 %. Les actifs financiers nets ont progressé de 4,5 % en 2017, en deçà des hausses observées les années précédentes mais globalement en ligne avec la moyenne d’après-crise. Avec des actifs financiers nets par habitant de 59 100 €, la France se place au 15e rang des 20 pays les plus riches (actifs financiers par habitant, voir tableau). La Suisse a repris la première place que lui avaient ravie les États-Unis l’année dernière. En général, les pays européens ont fait mieux en 2017 que les années précédentes, mais cela est avant tout dû à l'appréciation de l'euro.

En France, aucun changement dans le comportement d’investissement n’a été observé. La part des dépôts bancaires dans les nouveaux investissements se maintient à 50 %, et la demande de placements en actions et fonds d’investissement reste faible. Bien que leur épargne ait considérablement augmenté en 2017 – seuls les ménages allemands économisent davantage les revenus du travail que les français – les ménages français continuent de se montrer très prudents dans leurs investissements. En conséquence, le rendement implicite des actifs financiers a baissé en 2017 de 120 points de base à 4,2 % (avant inflation). La hausse de l'inflation crée une baisse du taux réel de plus de 200 points de base. Toutefois, depuis 2012, la performance des ménages français se situe dans la moyenne, avec un rendement réel moyen de 3,6 % ; ce chiffre est d'environ 2 % en Allemagne et de moins de 1 % en Autriche. Mais le rendement réel n'est pas le seul à avoir baissé l’année dernière, puisque les épargnants français pourraient subir de plein fouet le retour de l’inflation : les pertes de pouvoir d’achat en dépôts bancaires ont atteint 50 EUR par habitant en 2017 – reflet des rendements réels négatifs de cette classe d’actifs. Maigre consolation : ces pertes ont augmenté dans presque tous les autres pays de l'UE. Ainsi en Belgique voisine, elles se chiffrent à 670 EUR par habitant.

Les Français parmi les grands perdants de la politique de la BCE

Cependant, les rendements négatifs (après inflation) ne sont qu'une des facettes de la politique monétaire expansionniste. Les ménages sont non seulement des épargnants mais aussi des emprunteurs – qui bénéficient de taux d’intérêt bas. Le calculateur Allianz (https://www.allianz.com/de/economic_research/research_data/interest-income-calculator/), montre que même en intégrant le volet crédit dans le calcul, les ménages français n’ont pas bénéficié de la politique de la BCE : depuis le début de l’expansion monétaire, le revenu net d’intérêt a reculé d’environ 4 milliards d’euros cumulés. Ce chiffre est à comparer avec la hausse de 140 milliards d’euros pour les ménages espagnols, ou avec la perte de 110 milliards d’euros pour les ménages allemands. Si les ménages français n’ont pas été affectés par la politique de taux zéro, une analyse des autres secteurs de l’économie explique pourquoi la France en moyenne pénalisée. Ainsi les entreprises (non financières) et l’État ont bénéficié de la faiblesse des taux d’intérêt. Mais le revenu net d’intérêts des banques françaises a chuté de façon spectaculaire (à hauteur de 230 milliards d’euros). « Ces chiffres expliquent pourquoi il y a si peu de critiques françaises de la BCE, par rapport à l’Allemagne », commente Arne Holzhausen, co-auteur du rapport. « Alors qu’en Allemagne, les épargnants ordinaires sont les principales victimes, en France, ce sont les banques qui sont en première ligne – et la population ne le voit pas directement ».

 

 

Pour consulter l’étude, veuillez vous rendre sur notre page d’accueil :

https://www.allianz.com/en/economic_research/ à la rubrique Publications/Specials.

Une carte interactive des actifs et passifs des ménages est disponible ici :

https://www.allianz.com/en/economic_research/research_data/interactive-wealth-map

[1] Les actifs financiers incluent les liquidités et dépôts bancaires, les créances de compagnies d’assurance et d’institutions de retraites, les titres (actions, obligations et fonds d’investissement) et autres créances.

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Ludovic Subran

Ludovic Subran

Chef économiste du Groupe Allianz 

Ludovic Subran est Chef économiste du groupe Allianz, premier assureur et investisseur en Europe. Auparavant, il était Chef économiste d’Euler Hermes, filiale d’Allianz et leader mondial de l’assurance-crédit. Avant de rejoindre le secteur privé, il a travaillé à la Banque Mondiale, aux Nations-Unies et à l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques. Il enseigne l’économie à HEC et à Sciences Po. Il est diplômé de l’Ecole Nationale de la Statistique et de l’Analyse de l’Information et de Sciences Po.