- Pas de répit : le vieillissement des sociétés se poursuit à un rythme soutenu malgré la pandémie de Covid-19.
- Immobilisme : les systèmes de retraite dans le monde ressemblent à un vaste chantier inachevé. Seuls quelques pays se préparent à une transition démographique sans précédent.
- Repenser notre rapport au travail : le réexamen du rôle et de la place du travail doit être la clé de voute du système de retraite du futur.
- Étendre le champ des réformes : le système de retraite français bénéficie de l'augmentation de l'âge légal de départ (et obtient ainsi un indice Allianz Pension Index de 3,4), mais d'autres réformes restent nécessaires.
Allianz a publié la deuxième édition de son rapport mondial sur les retraites, Allianz Global Pension Report, qui analyse 75 systèmes de retraite dans le monde sur la base de son indice propriétaire, l'Allianz Pension Index (API). Cet indice repose sur trois piliers :
- L'analyse des conditions démographiques et budgétaires ;
- L’estimation de la viabilité du système de retraite sur le long terme (ex. financement, périodes de cotisation) ;
- Et l’adéquation du système de retraites (ex. couverture, générosités des prestations).
Au total, l’indice compte 40 paramètres, mesurés sur une échelle de 1 (très bon) à 7 (très faible). L'évaluation de chaque système de retraite se traduit par une note globale, moyenne pondérée de l’ensemble des paramètres[1].
Pas de répit
La pandémie de Covid-19 a entraîné une baisse de l'espérance de vie dans de nombreux pays. Dans quelques-uns, un (petit) baby-boom a même pu être enregistré. Toutefois, il ne s'agit que d'une interruption à court terme de la tendance continue et accélérée de vieillissement de la société, comme en témoigne le taux mondial de dépendance des personnes âgées[2] : il devrait passer de 15,1 % aujourd'hui à 26,3 % en 2050[3]. Une estimation pour 2050 qui devait « seulement » atteindre les 25,3% selon les prévisions établies en 2019. "Les dernières données en provenance de Chine, de Corée du Sud ou d'Italie, par exemple, indiquent une accélération des changements démographiques", précise Michaela Grimm, co-auteure du rapport et Economiste du groupe Allianz. Les taux de natalité évoluent moins bien que prévu, malgré les efforts déployés en matière de politique familiale. Le constat est unanime : le contrat intergénérationnel est devenu fragile. Les jeunes générations Y et Z, en particulier, sont appelées à prendre elles-mêmes des dispositions plus importantes pour leurs vieux jours.
Face à ce contexte défavorable, elles devront travailler plus longtemps, épargner davantage et de manière plus ciblée.
« Dans le contexte économique, démographique et social actuel, préparer sa retraite n’est plus une option. Il est impératif de la construire au plus tôt pour assurer son avenir financier, notamment en sélectionnant les bons placements pour optimiser et diversifier son capital en fonction de son profil. D’une manière générale, l’assurance-vie et le PER sont souvent recommandés, mais il existe d’autres leviers pour les épargnants les plus avertis. » ajoute Sylvain Coriat, membre du comité exécutif d’Allianz France, en charge des Assurances de Personnes.
Immobilisme
La note globale pour l'ensemble des systèmes de retraite dans le monde est de 3,6 : soit un niveau à peine satisfaisant. Par rapport au dernier rapport Allianz de 2020, cela ne représente qu'une légère amélioration. D'un côté, ce résultat n'est guère surprenant : après la pandémie de Covid-19, la guerre et la crise énergétique, la marge de manœuvre budgétaire de la plupart des pays s'est encore réduite. Mais il est toutefois décevant. La nécessité de réformer les systèmes de retraite n'est en effet pas contestée, mais la rhétorique est rarement suivie d’actions majeures. Seuls quelques pays comme la France ou la Chine ont réussi à améliorer de manière significative leur score cette année grâce à des réformes. Le débat en France résume d’ailleurs très bien l’économie politique de telles réformes, difficiles et impopulaires, puisqu’il s’agit de diminuer dès aujourd’hui des prestations trop généreuses pour éviter de le faire plus drastiquement demain. Les quelques systèmes de retraite qui se portent bien aujourd'hui, notamment ceux du Danemark, des Pays-Bas et de la Suède avec un score global bien inférieur à 3 (voir tableau), ont un point commun : ils ont pris très tôt le chemin de soutenabilité, à une époque où l’évolution démographique était encore maîtrisée. Ils peuvent donc servir de modèle à de nombreux pays, qui ont encore la possibilité de stabiliser leurs systèmes de retraite. Cependant, pour de nombreux autres pays, la transition ne sera guère possible sans des réformes difficiles.
Repenser notre rapport au travail
Outre les réformes paramétriques, modifiant les montants et les durées de cotisation, c’est bien une réforme systémique qui s’annonce, pour des systèmes de retraites durables et adaptés, notamment à cause de la valeur sociale du travail, totalement chamboulée.
"D’un côté, l'automatisation, la numérisation et l'intelligence artificielle révolutionnent l’accès à l’éducation et à la formation continue. De l’autre, la séparation entre vie active et retraite n’est pas une réalité pour bon nombre de gens, notamment dans des métiers pénibles et mal payés. Le système de retraite du futur commence par repenser l’employabilité pour tous", déclare Ludovic Subran, chef économiste du groupe Allianz.
Étendre le champ des réformes
Le système de retraite français affiche un score global de 3,4, le situant dans la première moitié des systèmes les plus solides au niveau mondial. Ce résultat est principalement dû à la dimension adéquation c’est-à-dire la générosité relative des retraites en France. Comme dans la plupart des pays, la viabilité à long terme du système de retraite français c’est-à-dire la qualité de son financement, elle, reste un problème. Même si cette dernière s'améliore grâce au relèvement de l'âge de la retraite de 62 à 64 ans, d'autres réformes seront nécessaires, compte tenu d’une marge de manœuvre budgétaire limitée et d’une évolution démographique contraignante. De nouvelles augmentations de la durée de cotisation, bien que politiquement très difficiles à mettre en œuvre, ne peuvent pas être exclues pour inciter à augmenter l'âge effectif de la retraite, qui reste relativement bas alors que l’espérance de vie est parmi les plus élevées au monde. Toutefois, les réformes des systèmes de retraite doivent aller de pair avec des réformes du marché du travail, axées sur l'amélioration de l'acceptation et de l'intégration des seniors.
Les meilleurs systèmes de retraite au monde avec un score total inférieur à 3
Pays |
Score total |
Conditions de base (score) |
Viabilité sur le long terme (score) |
Adéquation (score) |
Danemark |
2,2 |
3,0 |
2,5 |
1,4 |
Pays-Bas |
2,6 |
2,9 |
3,4 |
1,7 |
Suède |
2,6 |
3,1 |
2,9 |
2,1 |
Nouvelle-Zélande |
2,8 |
3,1 |
3,4 |
2,1 |
Etats-Unis |
2,9 |
3,5 |
2,8 |
2,6 |
Taïwan |
2,9 |
4,0 |
2,8 |
2,4 |
Israël |
2,9 |
2,8 |
3,5 |
2,5 |
Belgique |
3,0 |
3,9 |
3,0 |
2,4 |
|
|
|
|
|
France |
3,4 |
3,9 |
3,7 |
2,8 |
Retrouvez l’intégralité de ce rapport en cliquant ici.